News

Paysage Palimpseste


> Voir l’article sur www.journal-bacalan.fr

Paysage Palimpseste est un projet d’art urbain de Delphine Delas qui nous invite à découvrir un paysage passé et oublié, fantasmé ou réel des Grands marais de Bordeaux.

À la manière de ces parchemins qui gardent la trace des anciens textes imparfaitement grattés, le paysage palimpseste garde la trace d’héritages produits par l’action successive, sur un même espace, d’agents naturels et d’actions humaines.

Avec Paysage Palimpseste, son projet à Bacalan, l’artiste Delphine Delas souhaite faire remonter à la surface ces couches de lectures de la mémoire et des limites entre villes et paysages. Et, c’est au cœur de la Cité Jardin de Claveau, symbole même de l’histoire évolutive de cette zone anciennement paysage fermier et marécageux, où cohabitaient marais, moulins et nature sauvage que Delphine Delas trace un parcours visuel nous invitant à découvrir un paysage passé et oublié, fantasmé ou réel des Grands marais de Bordeaux.

En résonance avec ce parcours urbain et visuel, se déploient en septembre, une déambulation urbaine et une conférence sur l’histoire de l’art du paysage.

Qu’est ce qu’un paysage palimpseste ?

Delphine Delas, nous en dit plus :

” À la manière de ces parchemins qui gardent la trace des anciens textes imparfaitement grattés, le paysage palimpseste garde la trace d’héritages produits par l’action successive, sur un même espace, d’agents naturels et d’actions anthropiques. Ainsi témoigne-t-il des anciens chemins d’exploitation, des voies romaines encore visibles et inscrites, des voies ferrées et des gares désaffectées, etc…


Le paysage est un système vivant qui ne se conserve que s’il fonctionne donc que si il est normalement inséré dans un processus économique et social. Dans ce sens le paysage évolue et change dans le temps. Il peut être ainsi comparé à un palimpseste. L’évolution du paysage y ressemble, il reste toujours des traces du passé (routes, ponts etc).

Les trames des différentes époques historiques s’inscrivent en surimpression, le paysage évoluant dans le temps. Ainsi notre projet s’inscrit dans les théories que proposent le philosophe Sébastien Marot sur les paysages palimpsestes. Ses essais et recherches sur l’architecture et le paysage, qui l’ont notamment conduit au Centre canadien d’architecture en 2005, ont été récompensés par la Médaille de l’analyse architecturale en 2004, et par le Prix de la recherche en 2010, tous deux décernés par l’Académie d’architecture. Auteur de L’Art de la mémoire, le territoire et l’architecture (Paris, La Villette, 2010), il prépare actuellement l’édition de sa thèse : Palimpsestuous Ithaca : un manifeste relatif du sub-urbanisme. Une des grandes réflexions de Sébastien Marot, s’appuie sur un texte fascinant de Frances Yates The Art of Memory publié en 1966.

On y apprend que les Grecs avaient élaboré un véritable art de la mémoire qui consistait en la mémorisation par spatialisation d’images-souvenirs. La première étape était la visualisation très précise d’un lieu, souvent architectural, aussi varié et spacieux que possible. Les images qui représentent le discours dont on veut se souvenir y étaient alors placées, par l’imagination. Enfin, pour raviver la mémoire, il suffisait de parcourir mentalement ces lieux suivant un parcours défini.

Sébastien Marot soulève alors toutes sortes de questions fertiles autour de cette mnémotechnie savante, telles que : « un édifice pouvait-il devenir trop étroit et se saturer à force d’avoir servi ? »
Ou encore « quels rapports ces villes et ces bâtiments analogues pouvaient-ils entretenir entre eux et avec la ville réelle ? »


À cette dernière interrogation, Marot répond par l’hypothèse d’un chevauchement entre l’art de la mémoire et l’art proprement dit. Pour nous un des cas de paysages palimpsestes dans Bordeaux Métropole, se situe dans le quartier de Bacalan, quartier du nord de Bordeaux. En effet cette partie de Bordeaux était constituée de terres marécageuses importantes, ce qui limitait le nombre d’habitants. Les terres étant peu cultivables et les cultures mauvaises, l’assèchement des marais sera entrepris en 1599. Le projet fut alors confié à un Hollandais Conrad Gaussen, qui appliqua les mêmes méthodes que dans son pays, un procédé de dérivation et d’endiguement.

Bacalan se développera particulièrement à partir du XVIIIe siècle, le développement du quartier étant lié à celui du port de Bordeaux. Les zones d’activités ont pris peu à peu le pas sur les marais, enserrant le quartier habité de Bacalan.

Dans la première moitié du XIXe siècle, Bacalan a pris une certaine extension avec la délocalisation de quelques chantiers navals en sa faveur, à la suite de la construction du pont de pierre qui faisait obstacle sur le fleuve. La seule présence actuelle et vivante de ces grands marais de Bordeaux se situe au nord-ouest du quartier Bacalan, à Bruges en lieu et place sanctuarisée et protégée de la Réserve Naturelle Nationale des Marais de Bruges. Notre projet a donc l’ambition de faire remonter à la surface ces couches de lecture de la mémoire et des limites entre villes et paysages.”

Isabelle Chanut // www.aquitaineonline.com

Cliquer pour agrandir